Chapitre 3

Nous avons créé un monstre… quelque chose de précieux et même d’infiniment utile, mais de particulièrement dangereux néanmoins. Ce monstre est à la fois effrayant et splendide. Nous n’osons pas utiliser pleinement toutes ses capacités. Pourtant, nous ne pouvons pas non plus nous résoudre à l’abandonner.

Jugement gowachin sur l’Opération Dosadi.

 

Une balle heurta avec un ping ! la fenêtre qui se trouvait derrière le bureau de Keila Jedrik puis ricocha et se perdit en miaulant dans l’espace encaissé entre les deux rangées d’immeubles qui bordaient la rue, tout en bas. Jedrik se congratula intérieurement de n’avoir même pas bronché. Les patrouilles de l’Electeur se chargeraient du franc-tireur. Les soldats qui avaient pour tâche de ratisser chaque matin les rues de Chu convergeraient vers l’endroit où le coup de feu avait été entendu. Elle nourrissait le vague espoir que le tireur pourrait regagner sain et sauf les Régions Bordurières, mais elle décela un signe de faiblesse en cet espoir. Aussi elle abandonna rapidement cette pensée. Elle avait pour l’heure des sujets de préoccupation autrement importants que l’infiltration d’un Bordurier à Chu.

 

La main de Jedrik s’avança vers la tache de soleil matinal qui illuminait les plaques de contact du terminal relié à l’ordinateur de la Coordination Centrale. Ces doigts qui dansaient avec agilité… elle était presque capable de s’en dissocier. Ils voletaient, tels des insectes affairés, d’une touche à l’autre. Le terminal était austère et fonctionnel, véritable symbole de son statut de Liaitrice Principale, et trônait dans son alvéole au milieu du bureau de métal gris. La machine était grise, dorée, verte, blanche et sinistre. L’écran avait presque la même couleur que le dessus du bureau.

Avec une précision attentive et rythmée, les doigts de Jedrik jouaient sur le clavier leur symphonie de chiffres jaunes qui défilaient sur l’écran, totalement guidés, subjugués, calibrés par sa volonté, symboles à leur manière dorée d’un destin où se profilait la violence.

Tout ange a aussi une épée, se dit-elle.

Elle ne se considérait pourtant pas comme un ange, ni comme véritablement armée d’une épée. Son arme réelle était son cerveau, un cerveau aguerri, durci, adapté aux terribles décisions que la planète exigeait. Les émotions étaient une force à concentrer à l’intérieur de soi, ou bien à diriger vers l’extérieur, contre quiconque n’avait pas su tirer les conséquences des leçons données par Dosadi. Elle connaissait sa propre faiblesse et la dissimulait soigneusement : ses parents qui l’aimaient (mais qui avaient toujours caché leur tendresse derrière une cruauté raffinée) lui avaient appris eux-mêmes à quel point la lutte était dure sur Dosadi.

Jedrik observa les chiffres alignés sur l’écran de visualisation, effaça le tout et introduisit un nouveau paramètre. Par ce geste, elle savait qu’elle s’attaquait à la subsistance d’une cinquantaine d’habitants humains de sa planète. Beaucoup d’entre eux ne survivraient pas longtemps à ce mauvais coup. En vérité, ses doigts étaient des armes mortelles pour ceux qui n’étaient pas de taille à résister. Elle ne ressentait pourtant aucune culpabilité envers eux. L’arrivée imminente d’un certain Jorj X. McKie lui dictait ses actions et les précipitait.

Chaque fois qu’elle pensait à McKie, c’était un sentiment de satisfaction qui prédominait chez elle. Elle l’attendait comme un prédateur tapi à proximité d’un terrier. Le nom de McKie et les clés permettant de l’identifier lui avaient été communiqués par son chauffeur, Havvy, qui espérait ainsi se valoriser à ses yeux. Elle avait accepté le renseignement et s’était livrée à l’enquête habituelle. Jedrik était certaine qu’aucune autre personne sur Dosadi ne disposait des sources qui lui avaient permis d’arriver à de tels résultats : Jorj X. McKie était un Humain adulte dont l’existence même semblait impossible. Sur Dosadi tout entière, on n’avait pas trouvé le moindre document le concernant. Ni dans la Bordure vénéneuse, ni dans les garennes du Chu, ni dans aucune niche des structures existantes du pouvoir. McKie n’existait pas. Pourtant, il allait arriver à Chu d’un moment à l’autre, clandestinement introduit dans la cité par un Gowachin qu’elle contrôlait pour l’instant.

McKie était l’élément exact qu’elle avait attendu patiemment. C’était une clé qui pouvait lui donner accès au Mur de Dieu. Pas une clé tordue comme son chauffeur Havvy, mais quelque chose de sûr et de solide. Jamais elle n’avait envisagé de s’attaquer à une telle serrure avec des instruments inadéquats. Elle disposerait d’une chance et d’une seule. Il lui fallait ce qu’il y avait de meilleur.

Cinquante Humains de Dosadi prirent ainsi leur place anonyme derrière les chiffres de l’ordinateur. Simple chair à canon qui lui servait d’appât. Ceux qui mourraient à la suite de cet acte ne disparaîtraient pas immédiatement. Quarante-neuf d’entre eux, peut-être, ne sauraient jamais qu’ils avaient été délibérément voués par elle à une mort précoce. Certains seraient acculés à chercher une brève et aléatoire survie dans la Bordure. D’autres mourraient dans les violents combats qu’elle était en train de précipiter. D’autres encore dépériraient dans les garennes. Pour la plupart, le processus mortel s’étalerait sur une période de temps suffisamment longue pour que personne ne soupçonne la main de Jedrik. Mais c’était maintenant, à l’aide de cet ordinateur, qu’elle signait leur arrêt de mort, et elle ne cherchait pas à se voiler cette vérité. Elle maudissait ses parents (et tous ceux qui les avaient précédés) de lui avoir légué cette sensibilité indésirable devant le sang et la chair inhérents aux opérations des ordinateurs. Ses parents qui l’aimaient l’avaient bien éduquée. Peut-être ne verrait-elle jamais les corps sans vie, n’aurait-elle jamais à accorder d’autre pensée qu’à un seul des cinquante ; mais elle n’en sentait pas moins leur présence – vibrante et chaude – derrière l’écran de visualisation.

Elle soupira. Les cinquante étaient des animaux bêlants attachés à des pieux pour attirer un certain fauve sur le sol toxique de Dosadi. Les cinquante créeraient une situation de surplus fractionnel qui disparaîtrait rapidement, avant que quiconque ait eu le temps d’en comprendre la signification.

Dosadi est malade, pensa-t-elle. Et elle se demanda, une fois de plus : Est-ce vraiment l’enfer ?

Beaucoup y croyaient fermement.

Nous sommes ici pour être châtiés.

Mais personne ne savait ce qu’ils avaient fait pour mériter leur châtiment.

Jedrik se pencha en arrière et plongea son regard, au-delà de l’entrée sans porte de son bureau, en direction de la sonobarrière et de la lumière laiteuse du corridor. À ce moment-là, un Gowachin qu’elle ne connaissait pas apparut dans son champ de vision, silhouette batracienne se hâtant lourdement vers quelque mission officielle, un dossier marron serré dans ses mains noueuses. Sa peau verte luisait comme s’il venait de sortir de l’eau.

Ce Gowachin lui rappelait Bahrank, celui qui devait rabattre McKie dans son filet. Bahrank était dévoué corps et âme à Jedrik car elle contrôlait la substance dont il était adepte. Quelle bêtise de se laisser gouverner par une drogue quelconque, fût-ce la vie elle-même ! Un de ces jours, probablement bientôt, Bahrank vendrait tous les renseignements qu’il possédait sur elle à des agents de l’Electeur ; mais alors, il serait trop tard et l’Electeur n’apprendrait que ce qu’elle voudrait bien lui laisser apprendre au moment opportun. Elle avait jeté son dévolu sur Bahrank avec la même détermination qu’elle avait mise à se servir de son ordinateur et à attendre que se présente enfin quelqu’un comme McKie. En outre, Bahrank était un Gowachin et le peuple batracien était réputé pour son opiniâtreté à mener à bien les missions qui lui étaient confiées. Les Gowachins possédaient un sens inné de l’ordre et de la hiérarchie. Ils connaissaient aussi les limites de la loi.

Tandis qu’elle laissait errer son regard sur les murs du bureau, elle se sentit, devant la sobre et fonctionnelle efficacité de l’espace, emplie d’un amusement tranquille. Ce bureau donnait d’elle une image qu’elle avait construite avec un soin particulier. Elle se réjouissait de penser que bientôt, comme un insecte qui mue, elle quitterait ces lieux pour ne plus jamais y remettre les pieds. Le bureau faisait quatre pas de large sur une huitaine de long. Douze rotoclasseurs de métal noir s’alignaient contre le mur sur sa gauche, obscures sentinelles de ses desseins méthodiques. Elle avait modifié tous leurs codes de verrouillage et les avait piégés pour qu’ils s’autodétruisent au cas où les crapauds de l’Electeur viendraient fourrer leur nez dedans. Les gens de l’Electeur attribueraient cela à son hostilité méfiante, à un dernier geste de rancœur destructrice. Il faudrait un certain temps pour que les suspicions accumulées les conduisent à une réévaluation de la situation et à d’inévitables interrogations frustrées.

Même à ce stade, ils ne soupçonneraient peut-être pas sa responsabilité dans l’élimination de cinquante Humains. Après tout, elle-même faisait partie des cinquante.

Cette pensée l’inonda d’un brusque sentiment de détresse momentanée. Combien persuasives et combien subtiles étaient les séductions des structures du pouvoir sur Dosadi ! Ce qu’elle avait accompli ici revenait à introduire un grain de sable dans la machine informatique qui contrôlait la distribution des aliments non toxiques dans l’unique cité de Dosadi. L’alimentation… C’était la véritable base de la pyramide sociale de Dosadi, un édifice d’une solidité et d’une hideur à toute-épreuve. Le grain de sable la délogeait de la position assez élevée qu’elle occupait sur cette pyramide. Elle avait assumé le rôle de Keila Jedrik, Liaitrice Principale, durant de longues années, et c’était suffisant pour qu’elle eût pris goût au système. Elle perdait volontairement aujourd’hui une pièce fondamentale dans le jeu de survie sans fin que tous les Dosadis pratiquaient depuis leur naissance. Il faudrait désormais qu’elle vive et agisse uniquement à travers la personne de Keila Jedrik, Reine de Guerre. C’était un quitte ou double qu’elle était en train de jouer, un vrai plongeon de la mort. Elle en ressentait le vide glacé. En réalité, la partie avait débuté depuis bien longtemps, à une époque de l’histoire tourmentée de Dosadi où ses ancêtres avaient compris la vraie nature de leur planète et s’étaient mis à préparer en grand secret la naissance de l’individu destiné à accomplir le grand plongeon.

Je suis cet individu, se dit-elle. Le moment est venu pour nous.

Avaient-ils cependant évalué correctement la situation ?

Le regard de Jedrik se posa sur l’unique fenêtre qui donnait sur la rue en forme de canon. Elle fut confrontée à son propre reflet : visage trop étroit, nez mince, grands yeux et grande bouche. Sa chevelure aurait pu lui faire un casque appréciable de velours noir si elle l’avait laissée pousser un peu. Elle la coupait très court, comme pour se souvenir qu’elle n’avait rien d’une partenaire sexuelle douée d’un magnétisme particulier et qu’elle ne devait compter que sur ses facultés intellectuelles. C’était ainsi qu’on l’avait éduquée et formée. De très bonne heure, Dosadi lui avait infligé ses plus cruelles leçons. Elle avait grandi démesurément avant d’avoir dix-huit ans, tout dans le tronc et rien dans les jambes, de sorte qu’elle paraissait encore plus grande quand elle était assise. Elle regardait de haut, dans tous les sens du terme, la plupart des mâles gowachins et humains. C’était encore un don de ses ancêtres et de ses parents qui l’aimaient. Impossible d’échapper à la leçon dosadie.

Ce qui t’inspire amour ou intérêt servira contre toi.

Elle se pencha légèrement en avant pour cacher son reflet troublant et regarda tout en bas dans la rue. C’était beaucoup mieux comme ça. Ses concitoyens dosadis avaient cessé d’être des créatures de chair vibrante pour être réduits à l’état de lointains objets en mouvement, aussi impersonnels que les chiffres qui dansaient sur l’écran de son ordinateur.

Elle remarqua que la circulation était faible. Il y avait quelques rares véhicules blindés en mouvement, et pas le moindre piéton. Le seul incident avait été ce coup de feu tiré contre sa fenêtre. Elle espérait toujours, sans trop de conviction, que le franc-tireur avait pu s’échapper. Mais il était bien plus probable que cet imbécile se soit fait ramasser par une patrouille. Les Borduriers s’obstinaient à tester les défenses de la ville malgré des résultats invariablement négatifs. C’était le désespoir qui les poussait ainsi. Rarement les francs-tireurs attendaient le moment le plus avancé et le plus tranquille de la journée, ces heures où les patrouilles étaient dispersées et où même certains citoyens parmi les plus puissants s’aventuraient au dehors.

Des symptômes tout cela, des symptômes. Les incursions des Borduriers ne représentaient que l’un des nombreux symptômes dosadis qu’elle avait appris à reconnaître au cours de son ascension précaire dont le premier stade avait culminé dans cette pièce. Ce n’était pas qu’une pensée. C’était plutôt une impression, une sorte d’intuition familière qui revenait dans sa vie à certaines périodes de réflexion cruciale.

Nous entretenons avec notre passé des relations troubles que la religion est incapable d’expliquer. De plus d’une inexplicable manière, nous sommes des primitifs dont la vie est tissée de fils étranges et familiers, raisonnables et insensés.

Ce qui rendait certains choix insensés magnifiquement attrayants.

Ai-je fait un choix insensé ?

Non !

Toutes les données étaient soigneusement rangées dans sa tête. C’étaient des faits qu’elle ne pouvait oblitérer en faisant mine de les ignorer. Dosadi était née à partir d’un souk cosmique : « Un peu de ceci, un peu de cela, et puis ça encore… »

Ce qui favorisait les appariements impossibles.

La Poldem sur laquelle s’appuyait Dosadi pour faire tourner une société informatisée ne cadrait pas avec un monde dont toute l’énergie était transmise par un satellite en orbite géostationnaire. La Poldem exhalait une odeur d’ignorance primitive, témoin d’une société qui était allée beaucoup trop loin sur la pente du légalisme : une loi pour chaque chose et la loi au-dessus de tout. Le dogme sacré selon lequel un petit nombre d’élus inspirés par Dieu avaient choisi cette vallée encaissée pour y construire une cité isolée du reste de la planète toxique, et cela seulement une vingtaine de générations plus tôt, demeurait difficile à accepter. Quant au satellite pourvoyeur d’énergie qui orbitait au-dessous du Mur de Dieu, il réclamait l’existence d’une lente et complexe évolution en contradiction avec la survivance d’une institution aussi entachée de rigidité que la Poldem[1].

Le souk cosmique répondait à un dessein précis que les ancêtres de Jedrik avaient partiellement identifié.

Notre évolution ne s’est pas faite sur cette planète.

L’endroit était beaucoup trop déphasé, aussi bien par rapport aux Humains qu’aux Gowachins. Dosadi se servait simultanément de banques mémorielles d’ordinateurs et de fichiers manuels pour des résultats parfaitement identiques. En outre, le nombre de substances susceptibles de servir de drogues que l’on trouvait sur Dosadi était excessif. Pourtant, cela allait à l’encontre d’une religion si élaborée, si pesante dans ses exhortations à une « foi inconditionnelle » que les deux conceptions demeuraient dans un état d’opposition perpétuelle. Les mystiques continuaient à mourir pour leurs « nouvelles intuitions » tandis que les partisans de la « foi inconditionnelle » utilisaient leur contrôle des drogues astreignantes pour renforcer leur pouvoir. En réalité, la seule véritable croyance ayant cours sur Dosadi était que le pouvoir représentait la clé de la survie et que pour avoir le pouvoir il était nécessaire de régenter ce dont les autres avaient besoin pour survivre.

 

Cette société maîtrisait la médecine virale et bactériologique aussi bien que psychique, mais cela ne suffisait pas à évincer les mouvements clandestins des garennes et de la Bordure, dont les guérisseurs jabua soignaient leurs malades en faisant brûler leurs herbes de la foi.

Ils ne pouvaient pas non plus évincer (pas encore) Keila Jedrik car elle avait vu ce qu’elle avait vu. Paire par paire, les incompatibles fluaient et refluaient devant elle, dans la ville de Chu et dans la Bordure voisine. Dans tous les cas, c’était la même chose : une société qui se servait de l’un ne pouvait pas en même temps se servir de l’autre.

Pas si le processus était naturel.

Tout autour d’elle, Jedrik sentait la présence de Chu avec ses indigestes bipolarités. Deux espèces seulement étaient présentes : les Hommes et les Gowachins. Pourquoi deux seulement ? N’en existait-il aucune autre dans cet univers ? Certaines subtilités de la technologie dosadie indiquaient un fonctionnalisme adapté à des appendices sensiblement différents des doigts souples dont étaient munis les Humains comme les Gowachins.

Pourquoi une seule cité sur Dosadi entière ?

Le dogme ne fournissait pas le moindre éclaircissement.

Les hordes bordurières étaient à l’affût, toujours prêtes à déborder sur la sécurité aseptisée de Chu. Pourtant, elles avaient derrière elles une planète entière. Une planète toxique, il est vrai, mais il existait d’autres canons, d’autres sanctuaires en puissance. La survie des deux espèces plaidait pour l’édification de nouveaux sanctuaires qui puissent prendre la relève de ce trou pitoyable sur lequel Gar et Tria croyaient exercer un contrôle de fait. Mais non… Chu était la seule… quarante kilomètres de long et presque vingt de large, bâtie sur des collines et des bancs de sable à l’endroit où le fleuve ralentissait pour former son étroit canon. Au dernier recensement, quatre-vingt-neuf millions de gens s’y entassaient et trois fois plus encore étiraient leur brève existence dans la Bordure, toujours avides de trouver une place dans la cité protégée du poison.

Continuez à nous donner vos corps, stupides Borduriers !

C’était un message dont ils savaient reconnaître la signification, l’importance et la valeur de défi. Mais qu’avaient donc fait les habitants de Dosadi pour se retrouver emprisonnés ici ? Quels crimes avaient commis leurs ancêtres ? Il était juste de fonder un culte sur la haine de ces ancêtres… à condition qu’ils fussent vraiment coupables.

Jedrik se pencha en avant en direction de la fenêtre et leva les yeux pour regarder le Mur de Dieu, ce voile translucide et laiteux qui emprisonnait Dosadi et que pourtant des êtres comme ce Jorj X. McKie pouvaient impunément traverser autant de fois qu’ils le voulaient. Elle avait hâte de le rencontrer en personne afin de s’assurer qu’il n’avait pas été contaminé comme Havvy l’avait été.

C’était bien d’un McKie qu’elle avait besoin en ce moment. Le caractère outrageusement élaboré de tout ce qui concernait Dosadi lui soufflait qu’il devait exister quelque part quelqu’un comme McKie. Elle se voyait en chasseresse, et McKie était sa proie désignée d’avance. La fausse identité qu’elle s’était fabriquée dans cette pièce faisait partie du leurre. Maintenant qu’était arrivée la saison de McKie, les sempiternelles élucubrations religieuses grâce auxquelles les puissants de Dosadi préservaient leurs illusions privées n’allaient pas tarder à s’écrouler. Elle voyait déjà le début de cette dissolution ; bientôt, tout le monde le verrait comme elle.

Elle prit une profonde inspiration. Ce qui allait se produire bientôt représentait une sorte de purification, une simplification d’identité. Sous peu, elle se départirait de l’une de ses deux vies, transférant toute son attention sur la personne de l’autre Keila Jedrik, celle que Dosadi tout entière devrait apprendre à connaître. Ses proches avaient bien fait les choses en dissimulant soigneusement aux yeux des autres Dosadis la personnalité secrète d’une blonde pimpante et insignifiante tandis qu’ils montraient juste assez de celle-ci à « X » pour que les puissances à l’affût derrière le Mur de Dieu réagissent selon le schéma prévu. Elle se sentait véritablement lavée par le fait que le déguisement de son autre existence avait commencé à perdre de son importance. Tout son être pouvait maintenant émerger tranquillement dans cet autre lieu. Et c’était McKie qui avait précipité la métamorphose. Désormais, les pensées de Jedrik étaient claires et sans détours :

Entre dans mon piège. McKie. Tu vas me conduire encore plus haut que leurs appartements du palais sur les Monts du Conseil.

Ou au fond d’un enfer plus sombre que le pire des cauchemars.

Dosadi
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